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Tu bois un coup ?!
PL (Adresse IP journalisée) - dim. 6 août 2017 09:40:31

Savez-vous ce que vous avalez quand vous buvez la tasse ?
[www.slate.fr]

Françoise Gaill, conseillère scientifique à l’Institut CNRS Écologie et Environnement


Qui n’a jamais bu la tasse pour cause de vague plus puissante que prévue ou d’«ami» qui a décidé de vous couler par surprise? La quinte de toux passée, afin de recracher l’eau qui s’était frayée un chemin dans vos poumons, vous êtes passé(e) à autre chose. Alors que vous auriez dû, par amour pour la science, vous demander ce que vous aviez vraiment avalé –plus ou moins de travers. Car ce n’est pas parce que cette eau est dite salée (et non douce) qu’elle contient uniquement de nombreux sels dissous.

«Il suffit de regarder une goutte d’eau de mer au microscope pour s’apercevoir que ça grouille de bestioles!» énonce la biologiste Françoise Gaill, conseillère scientifique à l’Institut CNRS Écologie et Environnement et spécialiste des milieux marins et océaniques. Si vous voulez les admirer (et non vous contenter de les avaler en buvant la tasse), allez observer cette photo prise en 2006 par David Liittschwager, qui s’est amusé à grossir vingt-cinq fois une goutte d’eau de mer. Et, en effet, ça fourmille.

http://www.liittschwager.com/photos/MM7479_060920_2B7V4352cleanV2.jpg
[www.liittschwager.com]


Végétation en suspension

On y retrouve des êtres unicellulaires, comme les ciliés, appelés ainsi en raison de la présence de cils vibratiles à leur surface. Mais aussi de nombreuses bactéries, «qui vivent dans l’eau naturellement» –le bactérioplancton. Celles du genre Vibrio par exemple, comme la Vibrio alginolyticus, qui a l’inconvénient de pouvoir être à l’origine d’otites post-baignade mais est, rassurez-vous, rarement pathogène pour l’être humain.

On trouvera également des cyanobactéries. Si ce terme peut faire peur à tous ceux qui lui trouvent une consonance trop proche du cyanure, dites-vous que leur nom vient du grec ancien kuanos, qui signifie «éclat bleu». Ce n’est pas pour rien que les quatre premières lettres de ces bactéries, qui tiennent donc leur dénomination de la couleur qu’elles donnent à la mer, sont aussi celle d’une des couleurs primaires: le cyan. Et qu’elles portent aussi le nom plus parlant pour les néophytes d’algues bleues –même si elles ont l’air de petits filaments marron orangé. L’oxygène que vous respirez, c’est en partie grâce à elles, puisqu’elles «jouent le rôle de pompage de carbone» et de relargage de dioxygène dans l’air par le processus de photosynthèse. Appréciez donc ce phytoplancton (ou plancton végétal) à sa juste saveur pour toutes les fois où vous l’avez ingéré par mégarde en buvant la tasse!
Photosynthèse en surface

Ce ne sont pas la seule espèce de phytoplancton à camper en suspension dans l’eau de mer. Il y a aussi les diatomées, des microalgues unicellulaires. Sous leur délicate apparence de petits rectangles tachetés jaune et brun sur la photo prise par David Liittschwager, elles jouent elles aussi un rôle photosynthétique. Et c’est pour cela qu’on les trouve majoritairement en surface, au plus près de la lumière. Comme elles ont une enveloppe en silice, à leur mort, elles coulent au fond de la mer et viennent constituer des gisements de tourbe siliceuse ou former une roche appelée diatomite.

Forcément, cette composition de l’eau varie suivant les températures: «Quand il fait très chaud, le phytoplancton est boosté par la température et se multiplie très rapidement. Quand il fait plus froid, tout fonctionne au ralenti.» Ainsi que la profondeur et les courants, qui viennent brasser l’ensemble: «La densité des excréments des poissons et animaux marins est telle qu’ils tombent au fond de l’eau. Certaines bactéries peuvent aussi mourir plus facilement à la surface de l’eau quand la mer est agitée car l’air peut être toxique pour ces aquatiques», pointe Françoise Gaill. L’écume en est donc davantage exempte qu’une eau un peu plus calme.

Larves en croissance

Au côté de ces végétaux, on trouve du zooplancton (ou plancton animal). Certains sont du plancton temporaire, comme les œufs de poisson ou le crabe au stade larvaire, qui est, alors qu’il fait moins de 5 mm et est transparent, déjà reconnaissable par ses pattes sur la photo de David Liittschwager. D’autres, comme les copépodes, sont du plancton du début à la fin de leur vie. Avec leurs airs de minuscules crevettes, ils constituent la principale source de protéines des poissons en mer.

Il suffit de regarder une goutte d’eau de mer au microscope pour s’apercevoir que ça grouille de bestioles!

On peut aussi observer des chétognathes, des petits prédateurs appelés «vers sagittaires» parce qu’ils ont une forme de flèche. Ils représentent à eux seuls près de 10% du zooplancton. Il ne faudrait pas oublier non plus les vers aquatiques qui portent le nom de polychètes et, malgré leur petite taille, sont au-dessus du plancton dans la chaîne alimentaire.

Microplastiques en profusion

Il n’y a évidemment pas que des végétaux et animaux aux dimensions microscopiques que l’on absorbe en buvant la tasse. Il y a aussi tous les rejets dit anthropiques. Ceux qui sont dus à l’être humain. Je ne parle pas ici de l’urine, qui est, faut-il le rappeler, majoritairement constituée d’eau et se dilue dans l’immensité de la mer, mais des déchets, de l’essence aux crèmes solaires. On considère en effet que les océans sont recouverts d’un film d’hydrocarbures car environ six millions de tonnes d’hydrocarbures sont introduites chaque année par l’activité humaine dans les océans. Et qu’environ 25% des composants de la crème solaire se retrouvent dans l’eau au bout de vingt minutes de baignade —mais tous n’arrivent pas dans nos poumons ni notre estomac, puisque les silicones tout comme certains filtres non solubles dans l’eau se déposent et se sédimentent au fond de l’océan.

Et il ne faudrait pas oublier dans cette tasse d’eau de mer les microplastiques. Il arrive que des microplastiques conçus comme tel –des granulés industriels qui nécessitent moins d’énergie pour être chauffés, devenir du liquide et ainsi être moulés à la forme voulue–, se retrouvent dispersés en mer et prennent alors le poétique nom de «larmes de sirène», explique le spécialiste des déchets François Galgani, chercheur à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). À cause du typhon Vicente, un bateau avait perdu sa cargaison en juillet 2012 non loin de Hong-Kong et 150 tonnes de microplastiques avaient ainsi envahi les plages.

Reste que, exception faite de cet accident maritime, l’essentiel de ces microplastiques proviennent de la terre et sont amenés en mer par les rivières. C’est le cas des petites billes en polyéthylène, interdites à partir du 1er janvier 2018, que l’on trouve dans les produits cosmétiques visant à gommer les peaux mortes. Mais aussi d’une autre source de pollution insoupçonnée par le commun des buveurs de tasse: le textile. «Les cycles des machines à laver décollent des microfibres textiles, qui vont ensuite dans l’eau des rivières», détaille le chercheur à l’Ifremer. Direction: les grands espaces marins.
Fragmentation de coton-tige

Autres microplastiques en nombre dans l’eau de mer: ceux qui proviennent de la fragmentation naturelle du plastique déjà moulé. Vous pouvez ainsi absorber des microrésidus de cotons-tiges. Car nombre d’entre eux sont jetés par certains dans les toilettes, se faufilent partout, même dans les stations d’épuration, par leur petite taille et se retrouvent en mer. Heureusement que leur variante plastiquée sera interdite à partir du 1er janvier 2020.

Ce qui provoque cette fragmentation en morceaux microscopiques, inférieurs à 5 mm, ce sont «des attaques microbiologiques», c’est-à-dire que «des bactéries vont digérer une partie du plastique dont les liants»; mais aussi physiques, comme «une abrasion avec les mouvements du sable»; ou encore chimiques, renforcées par l’action du soleil –on parle alors de photolyse–, d’autant que «la plupart des emballages polymères vont flotter et rester en surface»: «Les liaisons chimiques du plastique vont être cassées par les UV, ce qui va fragiliser le plastique.»
Dispersion géographique

Le problème, c’est aussi que ces microplastiques «fonctionnent comme des buvards», ajoute l’océanographe spécialiste des déchets. Ils peuvent ainsi être des vecteurs de contamination. «Dans l’eau, un contaminant peut se fixer sur la paroi du microplastique. Or, une fois dans l’océan, le microplastique peut parcourir des milliers de kilomètres. Et un équilibre se fait: s’il y a moins de polluants dans l’eau, le microplastique va finir par les relarguer.»

«Les liaisons chimiques du plastique vont être cassées par les UV, ce qui va fragiliser le plastique»

François Galgani, chercheur à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer

Sans oublier que les kilomètres parcourus peuvent aussi conduire les microplastiques à être des «vecteurs de colonisation, qui brassent la diversité génétique»: les bactéries et autres êtres unicellulaires peuvent eux aussi se fixer dessus et se retrouver à mille lieues de leur habitat naturel. «Après le tsunami de 2011 au Japon, un gros morceau de quai a été amené par la dérive nord-atlantique aux États-Unis. On y a dénombré une centaine d’espèces nouvelles, sans compter les unicellulaires.» Or ces espèces sont potentiellement invasives et risquent de déranger leurs comparses autochtones. Il est donc tout à fait possible d’ingurgiter en buvant la tasse sur le littoral atlantique français des bactéries en provenance des États-Unis ou d’ailleurs, qui ont dérivé jusque dans vos gosiers à l’aide des microplastiques.
Bassin d’accumulation

À cela il convient d’ajouter que la quantité de microplastiques (et de polluants ou bactéries qui s’y accrochent) absorbée dans une gorgée d’eau de mer varie. «On les retrouve autour des estuaires et sur les plages, puisque le courant s’amoindrit. Ils peuvent alors s’accumuler», indique François Galgani. Ou dans les mers plus que les océans. D’abord parce que «les bassins fermés ont une plus grande concentration de microplastiques». La preuve, pour des raisons de salinité, à Gibraltar, le courant sortant est en profondeur tandis que le courant entrant est en surface, ce qui fait que les microplastiques, qui flottent, s’accumulent en Méditerranée.

Sans compter que, dans le bassin méditerranéen, transite 30% du trafic maritime mondial, c’est aussi un haut lieu touristique et s’y déversent plusieurs grands fleuves. Or, à lui seul, «le Danube charrie 4 tonnes de microplastiques par jour» dans la mer Noire, expose le chercheur à l’Ifremer. «Pour faire simple, poursuit sa consœur Françoise Gaill, il vaut mieux aller en Bretagne où l’océan se régénère beaucoup plus que dans le bassin d’Arcachon» pour boire la tasse –qui est une action plus révélatrice de nos modes de vie qu’il n’y paraît.

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I DROWNED IN THE SEAS AND I HAVE BECOME ALL SEAS. David Tibet
Re: Tu bois un coup ?!
shanga (Adresse IP journalisée) - dim. 6 août 2017 11:56:42

berk, c'est dégoûtant. j'arrête le surf.
Re: Tu bois un coup ?!
yaya (Adresse IP journalisée) - mer. 11 octobre 2017 21:24:07




j'aime les 2
jamais u de problème j’avoue quand même que depuis le 11 septembre je ne bois plus d'eau.
je ne dormais plus,jais arrêté l'eau du robinet ça va mieux.a+ BON SURF
Re: Tu bois un coup ?!
yaya (Adresse IP journalisée) - jeu. 19 octobre 2017 20:30:58

terrible microbe ça craint. j'en sais rien ,très bon sujet en tout cas .A+ BON SURF


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